Il y a quelques jours, François Ruffin était au Mazarin pour une projection et un débat sur son film Merci Patron.
Le film est assez jouissif. Et il met le doit là où ça fait mal. A plus d’un titre.
Jouissif d’abord car François Ruffin chausse avec talent les bottes de Michael Moore avec beaucoup plus de finesse. Avec un humour décapant (ça a bien rigolé dans la salle) F Ruffin se met à défendre la famille des Klur contre Bernard Arnaud à l’origine de leur précarité économique. Avec un humour décalé sans se prendre au sérieux le film prend au piège les pratiques douteuses de LVMH et Carrefour.
Le film est vraiment drôle et dans ces temps de morosité ambiance, ça fait pas de mal de se moquer à bon escient des riches. Même si c’est un peu Robin des bois contre les méchants voleurs..parfois revenir à des choses basiques ça fait du bien. Car le puissant Fakir et son agitateur en chef François Ruffin réussissent à extorquer 40 000 euros à B Arnault pour ne pas divulguer les méthodes scandaleuses de ce groupe. Le tout avec des dialogues à la Mlichel Audiard et une intigue à la John Le carré.
Le deuxième avantage du film c’est de montrer ce que les médias et les politiques ont évité d’évoquer depuis 30 ans, les patrons voyous, les délocalisations et la désindustrialisation .. même dans le secteur dit du luxe et de la qualité. Et de mettre des vrais gens derrière les méchants et derrière les victimes…Car oui, F Ruffin nous met face aux effets les plus dévastateurs des stratégies actionnariales des grands groupes qui dépècent et délocalisent. F Ruffin qui est partisan d’un protectionnisme européen , même s’il en parle peu dans le film nous pousse à nous interroger sur les effets de la concurrence interne à l’Europe même. Comment la recherche permanente de profits a détruit l’industrie française qui ne pèse aujourd’hui plus que 12% de la Valeur ajoutée créée en France. Sans heurts, sans bruit.
Et puis F Ruffin met le doigt là où ça fait mal en montrant la complicité d’un élu socialiste, avocat, au service de B Arnaud. Il nous montre ainsi qu’effectivement certains à gauche ont fait profession de vente d’influence. On ne peut s’empêcher de penser aux Cahuzac, Thevenoud et autres affidés de LVMH et Carrefour qui se battent pour être assujettis à l’ISF et ont abandonné la défense des classes populaires. Même si l’on peut ne pas suivre F Ruffin sur toutes ses positions politiques, on peut au moins lui reconnaitre la vertu de montrer que la gauche ne peut pas être défendue par des personnes qui vendent de l’influence et se vendent à des grands groupes. On sort du film convaincu que les formations politiques (PS en tête) ont bien besoin d’un coup de balai et de règles de transparence encore plus poussées.
Alors, il y a urgence à se mobiliser pour sortir du piège de la désindustrialisation et des délocalisations. En trouvant une harmonisation sociale et fiscale en Europe.
Il y a urgence à renouveler une classe politique de gauche qui a préféré le monde des affaires aux classes populaires.
Et il faut courir aller voir ce film qui vient de dépasser les 200 000 entrées. Et qui nous montre que parfois c’est nous qui pouvons gagner, il n’y a pas de fatalité.
Les photos des rencontres lors des deux projections.
http://deconnomistes.org/p-rencontres/photos